Les traitements

Généralités et traitements adjuvants

Selon le type de déficit en VWF et d’évènements cliniques, la prise en charge thérapeutique des patients atteints de MW est extrêmement variable allant de l’abstention thérapeutique à la mise en œuvre de traitements complexes. Il est important de bien connaître les caractéristiques de l’arsenal thérapeutique dont on peut disposer chez ces patients. Dans tous les cas,l’utilisation de médicaments adjuvants (antifibrinolytiques type acide tranexamique Exacyl®, Spotof ®, hémostatiques d’appoint type Coalgan®, Algosteril®, pommade cicatrisante HEC®, mèches résorbables à base de cellulose oxydée, pommade type Hemoclar® ou contenant de l’arnica, traitement des carences en fer (oral ou IV), et d’autres traitements par voie générale pour la prise en charge des ménorragies et des hémorragies digestives) doit être discutée en fonction de la situation clinique.

L’acide tranexamique (Exacyl) par voie orale ou intraveineuse est recommandé (seul ou associé au traitement spécifique) dans les hémorragies de la sphère oto-rhino-laryngologique, les hémorragies digestives et les ménorragies. Il est contre-indiqué dans les situations thrombogènes et dans les hématuries.

Le traitement oestroprogestatif permet souvent de réduire la sévérité des ménorragies, même s’il modifie peu les taux de VWF. Le recours à un dispositif intra-utérin au lévonorgestrel est également envisageable (Mirena®).

Les traitements hémostatiques locaux (colle biologique) sont efficaces et doivent être privilégiés chaque fois que possible.

Utilisation des antalgiques

Le recours à ces thérapeutiques nécessite de façon systématique la vérification de l’absence d’interférence avec l’hémostase de l’antalgique considéré. L’utilisation des anti-inflammatoires non stéroïdiens (type Ibuprofène®, Kétoprofène®, …) doit être limitée car elle est susceptible d’aggraver la symptomatologie hémorragique.

Traitements spécifiques

Lorsqu’il est décidé de mettre en œuvre un traitement spécifique visant à corriger le déficit en VWF et/ou en FVIII, il existe deux possibilités thérapeutiques : la desmopressine  d’une part et le traitement substitutif par VWF +/- FVIII d’autre part. Ils sont prescrits en collaboration avec le médecin prenant en charge le patient (anesthésiste-réanimateur ou autre) sous contrôle du médecin du CRC-MHC, qui propose un protocole thérapeutique pour assurer l’hémostase de façon transitoire en cas de geste invasif ou de symptomatologie hémorragique. Ils sont administrés en milieu hospitalier dans la majorité des cas, surtout pour les premières injections, par voie intraveineuse, hormis la desmopressine intra nasale ou sous-cutanée(Octim® Spray Nasal ou Octostim®, respectivement) qui peut être utilisée à domicile, sous réserve de respecter scrupuleusement les consignes thérapeutiques établies par le médecin du CRC-MHC et la restriction hydrique indispensable. Les traitements substitutifs par facteur Willebrand peuvent être poursuivis à domicile par exemple en post-opératoire tardif, ou pour le traitement de certaines manifestations hémorragiques lorsque l’état clinique du patient ne justifie pas son hospitalisation.

Traitements exerçant une action sur les taux de FVIII:C et de VWF : la desmopressine

La desmopressine (1-déamino-8D- arginine vasopressine ou dDAVP) est un analogue synthétique de l’hormone antidiurétique qui libère le VWF stocké dans les cellules endothéliales. Après administration, le taux de VWF (et de FVIII) s’élève de 2 à 5 fois en 30 à 60 minutes et retourne à son taux de base en 6 à 9 heures.

Elle se présente sous trois formes :

une forme parentérale (injection IV) : Minirin® dosé à 4 µg/ml,

une forme en spray nasal : Octim® Spray Nasal dosé à 150 µg/dose

une forme pour injection sous-cutanée dosé à 15µg/ml.

La décision de son usage est fonction :

– du type de MW (traitement privilégié de la MW de type 1. Elle est inefficace dans le type 3. Son efficacité est variable dans les autres types de la MW),

– de la sévérité du déficit

– de la réponse individuelle : nécessité de réaliser un test thérapeutique.

– de la durée du traitement en raison d’un phénomène de tachyphylaxie. En effet si l’administration de desmopressine est répétée, il existe dès la 2ème administration une diminution de la réponse de 30% et un épuisement de l’effet en quelques jours.

La réponse à la desmopressine est reproductible pour un même individu, mais varie d’un individu à l’autre, y compris au sein d’une même famille et peut être de courte durée dans certaines formes de MW. Il est donc capital de réaliser un test thérapeutique à la desmopressine avant la première utilisation clinique, en pratique après la connaissance du diagnostic, en milieu hospitalier, dans un centre disposant d’un laboratoire d’hémostase pouvant effectuer les dosages nécessaires, sous l’égide du médecin du CRC-MHC.

Traitements exerçant une action sur les taux de FVIII:C et de VWF : les concentrés en VWF

Le traitement par apport exogène de VWF est efficace dans toutes les formes de MW., Il doit être réservé au traitement préventif ou curatif de la MW lorsque la desmopressine est inefficace (du fait du type de MW ou de la situation clinique) ou contre-indiquée.

L’injection de VWF induit une augmentation progressive du taux de FVIII endogène, qui atteint son maximum dans un délai d’environ 12 heures [6] ; en effet, lorsque le déficit en VWF est corrigé, le FVIII synthétisé par le patient est stabilisé et reste en circulation. Ainsi, en urgence, chez un patient qui a un déficit en FVIII (inférieur à 40 UI/dl), la co-administration de FVIII est nécessaire. Les injections suivantes peuvent faire appel au concentré de VWF seul, pour éviter que l’addition du FVIII exogène au FVIII endogène ne contribue à produire des taux très élevés de FVIII (en particulier quand les injections sont répétées, comme en chirurgie), qui peuvent représenter un facteur de risque de thrombose veineuse. Ce schéma thérapeutique a fait la preuve de son efficacité.

Les concentrés disposant d’une AMM en France

Trois concentrés d’origine plasmatique disposent d’une AMM en France :

  • Wilfactin® et Wilstart® fractionnés et commercialisés par le laboratoire LFB. Le Wilstart® est en fait un conditionnement particulier qui comporte dans le même coffret un flacon de FVIII plasmatique (Factane®) et un flacon de VWF pur (Wilfactin®),
  • Voncento® fractionné et commercialisé par le laboratoire CSL Behring,
  • Eqwilate® fractionné et commercialisé par le laboratoire Octapharma

Les taux de FVIII contenus dans ces concentrés plasmatiques de VWF sont différents.

Un VWF recombinant dispose d’une AMM en France :

  • Veyvondi® produit et commercialisé par le laboratoire Takeda

Spécialités pharmaceutiques de VWF disponibles pour la population pédiatrique

Parmi les médicaments disponibles en France, seule la spécialité Voncento® a une AMM chez les enfants (indication dans toutes les tranches d’âge) pour la prophylaxie et le traitement des hémorragies ou des saignements d’origine chirurgicale. Le Wilfactin® et l’Eqwilate® ont une AMM avec une restriction pour l’enfant de moins de 6 ans en l’absence d’étude spécifique et/ou de donnée vis-à-vis de la sécurité et de la tolérance. En février 2020, la spécialité recombinante Veyvondi® n’a pas encore d’AMM pour le moins de 18 ans, les études n’étant pas disponibles. 

Les médicaments utilisés hors AMM dans la maladie de Willebrand en France

Certains médicaments peuvent être utilisés dans des indications différentes desquelles ils disposent une AMM en France dès lors qu’un bénéfice clinique et une sécurité d’emploi sont suggérées. Il s’agit de prescriptions hors AMM. L’observatoire du traitement de la filière MHEMO a pour rôle d’identifier les usages hors AMM et de réaliser une recherche bibliographique pour les justifier. Cette bibliographie est réalisée en lien avec un médecin référent du centre de référence pour la maladie de Willebrand : elle est utilisée dans le cadre des réunions de concertation pluridisciplinaire et pour argumenter les éventuelles demandes d’accès dérogatoires du médicament. Vous trouverez ci-dessous les fiches bibliographiques disponibles :

Les médicaments concentrés ne disposant pas d’une AMM en France

D’autres spécialités, non disponibles en France mais commercialisées dans d’autres pays ont des ratios FVIII:C/VWF :Act variables mais proches de ceux de Voncento® et Eqwilate®. L’expérience acquise et les données publiées avec ces produits sont importantes à considérer pour proposer des choix prioritaires parmi les concentrés qui peuvent être prescrits aux patients.

Pour en savoir plus sur ces traitements, leur usage et la méthode de priorisation : cf . PNDS MW HAS